La position d’EAU ET RIVIERES DE BRETAGNE SUR LES PER DE MERLEAC ET SILFIAC qui donne un avis négatif pour ces deux permis.
DEMANDES DE PERMIS EXCLUSIFS DE RECHERCHES MINIERES DITS DE LOC ENVEL ET SILFIAC – SOCIETE VARISCAN MINES
Les demandes de permis exclusifs de recherches minières déposés par la société Varican Mines concernent un ensemble de bassins versants de très haute qualité environnementale.
L’association Eau & Rivières de Bretagne exprime ci-dessous son analyse des projets et de leurs impacts potentiels sur la ressource en eau et les milieux naturels aquatiques.
A) Concernant la société Variscan mines : Variscan est une société française filiale à 100 % de PlatSearch NL, société australienne inscrite au Stock Exchange de Toronto (Canada). Cette filiale a été créée par 5 anciens employés du BRGM. La société n’est pas connue en France pour être un fournisseur de métaux.Le plus important des actionnaires de PlatSearch, HSBC Custody Nominies (Australia) Limited, possède des participations dans de nombreuses autres sociétés minières actives à travers le monde. Ce qui amène à s’interroger sur le véritable pilote du projet, tant au stade de l’exploration que de l’éventuelle exploitation.
B) Concernant le permis de Loc-Envel : le projet concerne 25 communes des Côtes d’Armor et s’étend sur 336km2. Les substances recherchés sont le Tungstène, le Molybdène, le Cuivre, le Zinc, le Plomb, l’Etain, l’Or, l’Argent et leurs substances connexes . Le projet coûtera 11 millions d’€ pour les 5 années du permis de recherche. Le projet de Loc-Envel concerne les bassins versants du Léguer, du Jaudy et du Trieux.
C) Concernant le permis de Silfiac : le projet concerne 5 communes des Côtes d’Armor, 9 communes du Morbihan et s’étend sur 173 km2. Les substances recherchés sont le Zinc, le Plomb, le Cuivre, l’Or, l’Argent, l’ Etain, le Tungstène, le Germanium et leurs substances connexes. Le projet coûtera 10,5 millions € pour les 5 années du permis de recherche. Le projet de Silfiac englobe les bassins versants du Scorff et du Blavet.
D) Sur les notices d’impact : ces documents sont très succincts. Ils ne constituent pas des notices d’impact : ils se bornent à décrire les opérations prévues (matériels, installations, etc…) et ne font aucune mention ni évaluation des impacts potentiels du projet, les seules mesures mentionnées n’étant en fait que des obligations réglementaires. Le bureau d’étude admet d’ailleurs que : « La principale difficulté de cette notice d’impact concerne la surface couverte du PERM … Il est difficile d’être précis sur les impacts de tel ou tel type de travaux, en particulier des forages, sur des milieux aussi variés, d’autant plus qu’il n’est pas possible de déterminer à l’avance le positionnement des opérations. » (p. 74 pour Loc-Envel).
Pourtant, cela n’empêche pas le bureau d’études d’affirmer pour chaque volet des opérations que l’impact sur l’environnement peut être considéré comme négligeable, tout en renvoyant à plus tard l’étude des impacts (p.57 pour Loc-Envel, et p.53 pour Silfiac).
E) Concernant les impacts sur l’eau : Les zones ciblées par les demande de permis sont des zones de tête de bassin versant dotée d’un chevelu hydraulique dense qui donne à son tour naissance à de nombreux cours d’eau (Léguer, Trieux, Jaudy, Blavet et Scorff).
Il convient de rappeler que ces cours d’eau assurent l’essentiel de l’approvisionnement en eau potable des collectivités (captages de Lannion, Plouaret, Pontivy, Hennebont Pont Scorf).f Le socle rocheux breton est parcouru de failles et fractures. Une partie des eaux de pluie pénètre dans ces fractures constituant des réservoirs souterrains qui se drainent progressivement, alimentant les zones humides et assurant entre 30 et 100 % de l’alimentation des ruisseaux et rivières (SILURES – BRGM). La protection de la qualité des eaux superficielles et souterraines est donc cruciale pour ces bassins versants tant en termes économique, que de santé publique.
Il est donc d’autant plus préoccupant de constater l’absence d’une étude d’impact complète. De plus, les dossiers évoquent la « morphologie plane des terrains » (p. 39 de l’annexe 7 Loc-Envel, p. 70 pour Silfiac) ce qui est surprenant quand on connaît le relief de ces secteurs.
Le Schéma Directeur d’Aménagement et de Gestion des Eaux du bassin Loire Bretagne 2010-2015 approuvé par arrêté du 18 novembre 2009, impose d’assurer la préservation de ces têtes de bassin versant qui « conditionnent en quantité et en qualité les ressources en eau de l’aval mais sont insuffisamment prises en compte dans les réflexions d’aménagement en raison d’un manque de reconnaissance de leur rôle » (orientation fondamentale 11).
F) Concernant les impacts sur les eaux souterraines : les notices d’impact fournies au dossier ne permettent pas d’apprécier correctement les risques liés aux forages carottés : de nombreuses études études pointent que l’efficacité des équipements de forage nécessite l’injection de boues lubrifiantes, dont la composition ne se résume pas à de l’argile et de l’eau. Les mélanges utilisés font appel à des matières argileuses spécifiques, donc des matériaux extraits et transportés de lieux lointains, ils comprennent aussi des additifs de synthèse : fluidifiants, plastifiants, anti-agglomérants. Ces composés, ajoutés à ce qui est pulvérisé par le trépan, resteront sur place après les opérations, et se disperseront alors dans l’environnement. Pourtant aucune information n’est fournie à ce sujet dans la notice d’impact.
Par ailleurs les notices d’impact indiquent (p. 67 pour Loc Envel et 63 pour Silfiac) « les nappes fissurales ne communiquent généralement pas entre elles » mais n’apportent aucune démonstration étayée à cette affirmation. L’absence de cartographie exhaustive des nappes fissurales concernées par les projets, et de leurs connexions ne permet pas d’apprécier l’impact des projet sur les eaux souterraines mais également superficielles, puisque les eaux souterraines contribuent pour entre 30 et 100% à l’approvisionnement des cours d’eau bretons (cf programme SILURES). Il est évident que des forages comme ceux envisagés dans le projet auront des impacts sur ces aquifères. D’une part, il est possible qu’ils libèrent des écoulements « captifs » (système du puits artésien). D’autre part, ils peuvent engendrer une modification des écoulements souterrains avec des conséquences sur les eaux superficielles.
G) La phase de recherche débouchera inéluctablement sur une phase d’exploitation, dont les conséquences environnementales sont très importantes et doivent être évaluées dès maintenant car :
1.les pompages nécessaires pour exploiter le minerai après dénoyage en souterrain ou en carrière auront pour conséquence un abaissement des nappes phréatiques entraînant un possible asséchement des forages et des sources du voisinage.
2.L’extraction des minerais de cuivre, plomb, zinc, mercure, molybdène pourra altérer gravement la qualité des eaux souterraines car ces minerais sont chimiquement des sulfures (chalcopyrite, galène, blende, cinabre, stibine). Ce sont des sulfures qui libèrent par oxydation de l’acide sulfurique au contact de l’eau.
3.Les processus d’enrichissement de ces minerais sulfureux nécessiteront une consommation d’eau importante.
4.Le stockage des stériles (rejets) après traitement pourra à long terme entraîner une pollution diffuse, difficile à maîtriser, des eaux souterraines et de surface.
5.Dans le cas de l’or, l’enrichissement par lixiviation consiste à arroser en continu des tas de minerai avec du cyanure ce qui représente évidemment un danger potentiel grave pour les eaux environnantes.
H) Concernant les impacts sur les zones humides : le transport sur site de l’équipement nécessaire aux forages nécessitera, en raison du poids celui-ci, de créer des voiries adaptées, même temporaires, avec décaissement de la couche arable, et pose d’un remblai de tout-venant compacté.
L’opération risque de perturber le fonctionnement hydrologique et l’écologie de ces zones, et de laisser des zones fortement compactées, voire imperméabilisées.
De plus, il est mentionné qu’en cas de présence de « chapeau de fer » des tranchées de 10 à 15m de long et d’environ 1,30m de profondeur pourraient être réalisées. Ce type de fossé, dans une zone humide, peut-être considéré comme du drainage et donc comme une destruction de cette dernière. Il est important de mentionner que depuis la réalisation de cette notice, les SAGEs du Blavet et du Scorff interdisent la destruction de zone humides. De plus, il n’est pas précisé que les forages éviteront les zones humides.
I) Concernant les zones sensibles : les projets impactent de nombreuses zones classées Natura 2000 en raison de la présence d’espèces ou d’habitats naturels d’intérêt européen :
• Pour Loc-Envel Il peut impacter 6 zones Natura 2000 dont une directement « Rivière Leguer, forêts de Beffou, Coat an Noz et Coat an Hay ».
• Pour Silfiac Il impacte directement 3 zones Natura 2000, « le complexe de l’est des montagnes noires », « la Rivière Scorff, Forêt de Pont Calleck, Rivière Sarre » et « la Forêt de Quénécan, vallée du Poulancre, landes de Liscuis et gorges du Doualas ».
Il est fait mention dans la notice d’impact que : « les zones sensibles type Natura 2000 seront dans la mesure du possible, soigneusement évitées ». La réalisation de forages n’est pas compatible avec la protection des espèces et des milieux de ces zones.
Par ailleurs, si le bureau d’étude estime que les incidences de cette phase de prospection sont probablement faibles, il semble qu’il y ait eu une sous-estimation des milieux naturels sensibles (cf courrier de l’association de la Vallée du Léguer du 22 février 2015).
Pour ces raison, et compte-tenu des insuffisances des notices d’impact présentées à l’appui de la demande de permis, notre association donne un avis défavorable aux demandes de permis exclusifs de recherches minières déposés par la société VARISCAN pour les sites de LOC ENVEL et SILFIAC.
LE PRESIDENT
Dominique AVELANGE